Petite histoire de la notion d’ambiance


resumo resumo

Jean-Paul Thibaud



déterministe faisant de l’homme une entité isolée traversée par un ensemble de forces qui lui échappent[14].

Malgré cette rupture, on retrouve la conception partagée d’un environnement actif, ayant des effets sur le corps, l’esprit ou le comportement des individus. Cette influence se traduit de différentes manières selon les époques : dans la pensée d’Hippocrate pour qui le climat ou l’atmosphère agit sur la constitution humaine, dans l’Esprit des Lois de Montesquieu, dans la notion de milieu ambiant chez Newton ou encore dans la théorie du milieu de Taine. Bref, si la notion d’ambiance est sous-tendue par l’idée d’une force active s’exerçant sur l’être humain, cette force s’est dotée d’une connotation protectrice ou menaçante, en symbiose avec l’homme ou au contraire extérieure à lui selon les diverses conceptions du monde mises en jeu.

Outre la recherche étymologique, d’autres méthodes ont été utilisées pour tenter de clarifier le terme « ambiance » : rechercher l’équivalent dans d’autres langues, travailler sur l’écart sémantique de mots voisins en français (milieu, climat, atmosphère) ou rapporter le terme ambiance aux qualificatifs auxquels il se prête dans le langage courant. De tels procédés remettent là encore en cause le simple usage de dictionnaires : « Le sens précis d’un mot, souvent, ne se laisse pas exprimer dans une simple définition lexicographique : son usage et ses valeurs, en fin de compte, n’apparaissent pleinement qu’à la lumière des exemples et des contextes – ces derniers constituant en somme l’ambiance même des mots, indispensable à la compréhension exacte de leur caractère. »[15] Sans entrer dans le détail, retenons simplement quelques arguments.

Premièrement, la parenté sémantique entre l’ambiance, le milieu ou le climat vient du fait que tous trois renvoient à ce qui nous entoure, nous enveloppe et nous influence. Par contre, la spécificité de l’ambiance par rapport aux deux autres termes est de mettre en avant directement la dimension des sentiments : « Milieu, c’est un terme sobre, neutre, strict, qui se ressent toujours, plus ou moins, de sa tradition scientifique. Ambiance et climat sont des termes colorés, évocateurs – climat grâce à la métaphore toujours présente à l’esprit, et ambiance à cause des sentiments qu’il suggère. »[16] Si le climat se définit comme « l’ensemble des conditions atmosphériques auxquelles une région est soumise », il ne se dote d’une connotation affective que par un usage

Nilsson-Ehle, H. (1957) Ambiance, Milieu et Climat. Studia Neophilologica. Vol. XXIX, n° 2, pp. 181-191.



[14] Notons que certains penseurs, tel Goethe ou les frères Goncourt, n’ont pas manqué de réagir à cette conception moderne du milieu et ont tenté de renouer avec les leçons de l’Antiquité.

[15] Nilsson-Ehle, H. (1957) Ambiance, Milieu et Climat. Studia Neophilologica. Vol. XXIX, n° 2, pp. 181-191.

[16] Ibid.















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