Petite histoire de la notion d’ambiance


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Jean-Paul Thibaud



sensoriel avec l'ambiance, c’est la dynamique de ces contacts qui est ici visée. C’est ainsi que l’ambiance est à penser en termes de devenir : « L’ambiance ici ne doit point être assimilée à ce que, lorsque nous parlons de perceptions, nous appelons « monde extérieur », ni pas conséquent décomposée en ses prétendus éléments. Elle doit être prise comme un tout vaste et vivant, dans tout son dynamisme primitif, dans lequel par la suite seulement l’homme, à l’aide de procédés analytiques à sa portée, arrive à discerner des êtres vivants, des objets et jusqu’à des excitants physiologiques. L’ambiance, dans ses particularités, n’est point chose faite ; elle se fait au contact de l’homme comme celui-ci se fait au sien. L’ambiance primitivement est un océan mouvant. Elle est le devenir. »[31] Cette façon de penser n’exclue pas le monde des sens de l’ambiance. Bien au contraire, il s’agit plutôt de dégager la portée vitale de nos sens en montrant comment chacun d’eux procède d’un mouvement d’ouverture au monde spécifique. Ainsi, à chaque sphère sensorielle correspondrait une attitude particulière de l’être humain à l’égard de la vie ambiante : retentir (l’auditif), se répandre (l’olfactif), goûter (le gustatif), toucher (le tactile)[32]. Pour Minkowski, les métaphores expriment le rôle structural que joue chaque sens dans la contexture générale de la vie. Bref, ce serait à partir du devenir ambiant que s’articulerait le phénoménal au psychique, le monde matériel au monde spirituel.

Pour Binswanger, l’espace thymique repose sur trois « radicaux existentiels » complémentaires et indissociables : la spatio-temporalité, l’affectivité et la corporéité (à ceux-ci pourrait d’ailleurs être rajouté le rapport à soi et à autrui[33]). Le fondateur de la Daseinanalyse s’attache ainsi à identifier et décrire le complexe dynamique qui articule ces trois dimensions. Partant de l’idée que le sens de notre rapport au monde est déjà inscrit dans le langage, il propose la notion de « direction de sens » (Bedeutungsrichtung) pour en rendre compte. D’une certaine manière, il s’agit de redonner tout son poids et toute son épaisseur aux expressions du langage courant pour dévoiler les formes et structures fondamentales de l’être-au-monde. Prenons l’exemple paradigmatique de la chute : « Lorsque, brutalement déçus, nous ‘tombons du ciel’, nous tombons effectivement ; mais ce n’est ni une chute purement physique, ni une chute qui l’imite (métaphoriquement ou analogiquement) ou qui est en soi dérivée ; plus exactement, l’essence de la déception brutale et de l’effroi consiste en ceci que

Minkowski, E. (1999) Vers une cosmologie. Paris : Payot.



[31]Minkowski, E. (2002) Constitution et conflit. In Ecrits cliniques. Ramonville Saint-Agne: Erès, p. 67-79

[32] Minkowski, E. (1999) Vers une cosmologie. Paris : Payot.

[33] Je pense en particulier à l’importance qu’il donne au phénomène de la rencontre.















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