Petite histoire de la notion d’ambiance


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Jean-Paul Thibaud



Pour résumer, trois idées principales peuvent être retenues de la psychopathologie des ambiances. Premièrement, le domaine des ambiances renvoie à un niveau vital et non-thématique de l’expérience. En-deçà d’un rapport de connaissance, d’objectivation ou de représentation du monde, l’ambiance relève plutôt de la présence au monde. Elle engage à la fois la manière dont nous nous sentons dans le monde et la façon dont nous le ressentons. Pour autant, on ne doit pas creuser outre mesure la distinction entre le sentir et le percevoir mais plutôt chercher des moyens d’articuler ces deux versants[40]. Deuxièmement, l’ambiance renvoie d’abord et avant tout à des tonalités affectives. Néanmoins, loin d’être indépendantes d’autres composantes de l’expérience, elles ne prennent de sens que rapportées à des formes spatio-temporelles, des qualités de mouvement et des données sensibles. Troisièmement, l’ambiance peut être déclinée à partir d’une logique modale. Elle ne désigne pas le « quoi » de l’expérience mais le « comment ». L’articulation de ses diverses composantes permet ainsi d’identifier des manières d’être particulières qui engagent aussi bien le sujet lui-même que le monde dans lequel il se trouve. Bref, l’ambiance ne serait autre qu’une manière d’identifier, de décrire et de distinguer des « styles d’exister » (Maldiney).

 

Esthétique des ambiances

Après avoir traité de la sémantique et de la psychopathologie des ambiances, qu’en est-il de l’approche esthétique ? La notion d’ambiance concerne l’esthétique au premier chef dans la mesure où elle est pose explicitement la question de la sensorialité humaine. Deux éléments de cadrage permettent de positionner l’esthétique vis-à-vis de la thématique des ambiances. D’une part, l’ambiance convoque une esthétique environnementale en aucun cas réductible à une esthétique des beaux-arts. Ainsi, ce n’est plus l’œuvre d’art qui est au centre de cette esthétique mais bien plutôt la nature, comprise au sens large du terme (en incluant la ville et l’urbain). Pourtant, si l’esthétique environnementale procède à la fois d’une pente narrative et d’une pente



[40] Ainsi, Barbaras (1999, op. cit.) remarque à juste titre : « Il va de soit que nous ne vivons pas exclusivement dans cette dimension pathique dans laquelle l’animal, lui, est enfermé ; nous avons toujours déjà dépassé la stricte relation empathique au profit d’une mise à distance thématique qui saisit les expressions comme déterminations d’une chose, nous vivons dans l’univers de la perception. »  Ou bien encore, en formulant un peu autrement cette même idée, Maria Villela-Petit écrit ainsi : « En tant qu’êtres humains nous ne saurions en rester à la seule dimension du sentir, sous peine de ne pas avoir accès à la pensée, mais cette dimension de notre être-au-monde, nous ne la quittons non plus jamais, sauf dans les cas extrêmes de rupture pathologique de notre communication pathique avec le monde. » cf. Villela-Petit, M. (1992) Espace, temps, mouvement chez Erwin Straus. In Figures de la Subjectivité. Etudes réunies par Jean-François Courtine, Paris : Editions du CNRS, pp. 51-69.















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